Déni de démocratie

Lire:  Oui à un référendum

 

 

 

 

C’est bien un véritable passage en force, pour reprendre le titre du Politis de la semaine dernière, que tentent les vingt-sept chefs d’Etat et de gouvernement de l’Union européenne, en nous imposant un « traité modifiant » les traités européens existants. L’exercice, on le sait, consiste essentiellement à nous resservir en contrebande les dispositions et orientations du traité constitutionnel européen, rejeté par les peuples français et néerlandais au printemps 2005, en évitant soigneusement de consulter les citoyens des vingt-sept pays membres sur ce texte parfaitement illisible.

La palme de la précipitation revient à Nicolas Sarkozy. Persuadé d’avoir obtenu « une très grande victoire » comme le claironne l’UMP dans un communiqué du valet en chef Devedjian, et bénéficiant de l’onction du Medef [1], le président de la République « souhaite que [la] ratification » du traité adopté lors du sommet européen de Lisbonne ; dans la nuit de jeudi à vendredi, « puisse avoir lieu dans les plus brefs délais possibles, c’est-à-dire au mois de décembre 2007 ». C’est du moins ce qu’il a déclaré lors d’une conférence de presse à l’issue de cette réunion.

Certes on sait, depuis sa campagne électorale, que Nicolas Sarkozy n’entend pas soumettre à référendum un nouveau traité européen. Mais, sauf à transformer l’Assemblée nationale et le Sénat en machine à voter, on voit mal comment une ratification parlementaire aussi rapide serait possible.

En effet, ce n’est que le 13 décembre que le nouveau traité sera formellement signé, à Lisbonne, par les Vingt-sept. Or la session parlementaire s’achève ordinairement le dernier vendredi avant Noël, soit le 21 décembre.

Dans ce cours laps de temps, il faudrait que les députés et sénateurs modifie la Constitution de la Ve République. En théorie l’exercice est assez simple puisqu’il suffit de remplacer dans l’article 88-1 la référence au traité constitutionnel européen (« La République peut participer à l’Union européenne dans les conditions prévues par le traité établissant une Constitution pour l’Europe signé le 29 octobre 2004. ») devenue caduque, par une autre de ce style : « La République peut participer à l’Union européenne dans les conditions prévues par le traité modifiant le traité sur l’Union européenne et le traité instituant la Communauté européenne signé le 13 décembre 2007. » Notons que cette substitution nécessite au minimum une journée d’examen à l’Assemblée nationale, une autre au Sénat, puis une dernière en Congrès (réunion commune de l’Assemblée nationale et du Sénat), à Versailles, où cette modification préalable à toute ratification doit réunir une majorité de 3/5 des suffrages exprimés.

Ce n’est qu’une fois franchie cette étape que l’Assemblée nationale et le Sénat pourront procéder à la ratification voulue par Nicolas Sarkozy. Deux jours au moins sont nécessaires. Total cinq jours. Et cela sans compter le nécessaire examen du projet de modification constitutionnelle en commission dans chacune des chambres (compter un jour de plus au moins), ni celui du traité qui compte pas moins de 256 pages illisibles pour non-juristes (prévoir un jour pour une vrai-faux examen).

Au final, c’est bien au moins sept jours de travail parlementaire (bâclé) que nécessite la ratification du traité modificatif. Ce qui supprime non seulement tout week-end à nos élus, mais ne permet pas un examen attentif et contradictoire du texte.

A moins que Nicolas Sarkozy ne convoque une nouvelle fois une session parlementaire extraordinaire, entre Noël et le Jour de l’an. Cela ne s’est jamais vu. Mais avec un Président débarrassé de Bobonne et de ses récriminations (« C’est à cette heure-là que tu rentres ? » « Tu travailles encore ! »), on peut s’attendre à tout.

« Ensemble, tout est possible », proclamait son slogan de campagne. Tout ? Oui. Même un déni de démocratie.

 

[1] Le Medef a estimé vendredi que l’accord conclu vendredi à Lisbonne par les 27 chefs d’Etat et de gouvernement sur le « traité réformé » remplaçant la Constitution européenne est « une bonne nouvelle pour tous les Européens ». On ignorait que l’organe du patronat français pouvait parler au nom des Européens...

 

 

 

 

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C
PARIS (Reuters) - Une partie des anciens opposants à la Constitution européenne, en 2005, se sont regroupés au sein d'un comité national pour exiger un nouveau référendum sur le traité de Lisbonne.<br /> La secrétaire nationale du PCF, Marie-George Buffet, le sénateur socialiste Jean-Luc Mélenchon et l'ancien ministre Jean-Pierre Chevènement font partie des premiers signataires.<br /> <br /> <br /> <br /> <br /> <br /> <br /> <br /> <br /> <br /> <br /> Un site internet a été ouvert (www.nousvoulonsunreferendum.eu), recensant les signatures. Jeudi soir, 24.638 personnes avaient paraphé la pétition.<br /> "Nous appelons en urgence toutes celles et tous ceux qui sont attachés à la démocratie et à une Europe fondée sur l'adhésion des peuples, qu'ils soient pour ou contre ce nouveau traité, à nous rejoindre pour empêcher un déni de démocratie et exiger la tenue d'un référendum", lit-on sur la page d'accueil.<br /> Plusieurs élus de la gauche du PS ont rejoint le comité national. Pendant la campagne présidentielle, Ségolène Royal avait défendu l'idée d'un nouveau référendum sur les institutions européennes, une exigence que l'ancienne candidate et la direction du PS ont abandonné il y a quelques semaines.<br /> D'anciens hérauts socialistes du "non" en 2005 - Vincent Peillon et Arnaud Montebourg en tête - ont annoncé leur intention d'approuver le nouveau traité institutionnel.<br /> D'autres figures de la campagne contre la Constitution figurent parmi les signataires, comme Francine Bavay des Verts, Claude Debons, animateur du "collectif du 29 mai" ainsi qu'Aurélie Trouvé, co-présidente d'Attac France, et le président d'honneur du mouvement altermondialiste, Bernard Cassen.
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C
<br /> Traité de Lisbonne : le PS à la dérive <br /> <br /> <br /> Le parti socialiste a décidé d\\\'approuver au Parlement l\\\'adoption du traité de Lisbonne, calquant sa position sur celle du gouvernement. En exigeant un référendum, le PS aurait pu réduire le fossé qui le sépare du peuple. Vaine espérance. <br />
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J
CE MINI TRAITE EST SURTOUT UNE GRANDE ARNAQUE!
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E
<br /> Dans un entretien à The Independent, Valéry Giscard d'Estaing avoue qu'il n'y a pas de différence entre le traité simplifié et le traité constitutionnel rejeté par les Français en 2005. <br /> <br /> <br /> <br />  <br /> <br /> <br /> <br /> « Les outils sont exactement les mêmes. Seul l'ordre a changé. » déclare, sur son blog et dans le journal anglais The Independent l'ancien président de la République. Pour Valéry Giscard d'Estaing, qui dirigeait, en 2002 et 2003, Convention sur le Futur de l'Europe, la différence entre le traité constitutionnel (TCE) de 2005 et le traité modifié de 2007 est dans la méthode plus que dans le contenu. Le texte de 2005 avait été débattu publiquement et devait remplacer tous ceux écrits précédemment: « Il s'agissait de simplifier les institutions européennes rendues inefficaces par les derniers élargissements, de mettre davantage de démocratie et de transparence dans l'Union européenne, et d'ouvrir la voie vers une Constitution pour les citoyens européens. » Pour le traité de Lisbonne, le processus n'a pas été le même, ce sont les juristes du Conseil qui ont été chargés de rédiger le texte, mais aucune suggestion n'a été faite, ils ont simplement repris les mêmes principes dans un ordre différent. Les rares changements sont symboliques. L'appellation de « Constitution » a disparu et les symboles européens, comme le drapeau et l'hymne de l'Europe, ont été supprimés. « Quoique ridicules, et destinées heureusement à rester inappliquées, ces décisions sont moins insignifiantes qu'elles n'y paraissent. Elles visent à écarter toute indication tendant à évoquer la possibilité pour l'Europe de se doter un jour d'une structure politique», précise Giscard. Bref, si l'Europe est bien en train de se doter d'une Constitution, il ne faut pas que cela se voit. Autre changement par rapport au TCE : les concessions faites aux Anglais. La charte des droits fondamentaux, sorte de version améliorée et actualisée de la charte des droits de l'Homme, est retirée du projet, et fera l'objet d'un texte séparé, ce qui permettra à la Grande-Bretagne de ne pas être liée par elle. On ne peut pas vraiment parler d'une avancée… VGE dit tout haut ce que les rares et courageux lecteurs du traité (240 pages pas du tout simplifiées) savent, sans un instant se poser la question du respect du suffrage universel. Suffrage qui, en 2005, a rejeté un texte, de son aveu très similaire. Ce déni de démocratie ne semble pas l'atteindre. Sur la possibilité d'un référendum, il reste d'ailleurs très obscur : « La phase suivante sera celle des ratifications. Elle ne devrait pas rencontrer de grandes difficultés – en dehors de la Grande-Bretagne où un référendum aboutirait manifestement à un rejet -, car la complication du texte, et son abandon des grandes ambitions suffisent pour en gommer les aspérités. » Est-ce à dire qu'il faut continuer à ce que les textes européens soient imbuvables pour qu'ils soient acceptés sans débat ? Difficile d'en être sûr, tant la prose giscardienne est alambiquée. <br /> <br />  <br /> <br /> <br /> <br /> Mercredi 31 Octobre 2007 - 00:22<br />
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E
<br /> Traité modifié, démocratie bafouée <br /> <br /> <br /> Par André Bellon (*). Le traité de Lisbonne est sur le fond totalement identique à la Constitution européenne de mai 2005, celle-là même que les Français ont refusée par leur vote. Histoire d'un mépris pour les décisions populaires. N2T<br /> <br />  <br /> <br /> <br /> Nicolas Sarkozy nous avait promis : « Je tiens compte du vote des Français ; il n'y aura qu'un mini traité technique ». On sait ce que valent ses promesses. Mais là, il s'est surpassé. Le traité n'est pas mini du tout ; il est, à quelques éléments symboliques près, le jumeau du précédent ; certes, ce n'est plus une Constitution et c'est bien même s'il faut rappeler que la question était restée en suspens en 2005 ; certes, certains chapitres ont disparu, mais ils sont évoqués dans les annexes, ce qui leur donne la même force juridique que le corps du texte. Le nouveau traité conserve donc la teneur du texte antérieur tout en le rendant encore plus illisible. Fier de ce tour de force, Nicolas Sarkozy entend faire ratifier en urgence et par le seul Parlement. La volonté populaire, clairement exprimée le 29 mai 2005, est considérée comme quantité négligeable, la démocratie est bafouée. De façon ahurissante, les principaux dirigeants de la soi-disant opposition semblent, pour la majorité d'entre eux, trouver ce choix acceptable et légitime et ne pas vouloir s'y opposer avec fermeté. La « social-démocratie » n'est même plus démocrate. Il ne saurait être question de transiger avec les principes fondamentaux des droits du peuple. Un vote a eu lieu. Il doit être respecté. Seul un nouveau vote populaire pourrait légitimer un nouveau traité. Les instances politiques actuelles n'ont aucun droit à s'y substituer. Dans le cas contraire, il s'agirait d'un véritable coup d'État. Si, par malheur pour nos principes politiques, les dirigeants de ce pays persistaient dans leur volonté de passer en force, il est impératif, dans un souci démocratique qui doit être celui de tout citoyen : 1/ de faire savoir aux parlementaires que leur vote favorable à ce « nouveau » traité les positionnera en adversaires de la volonté populaire et que les citoyens devront en tirer les conséquences lors des prochaines échéances électorales. 2/ de se préparer à dénoncer dans toutes les prochaines élections et sous les formes les plus adaptées tous les élus qui auront soutenu ce coup de force. 3/ de se rassembler pour imposer enfin de nouvelles règles du jeu politique contre des institutions et des pratiques qui ne représentent plus les électeurs et stérilisent tout débat politique sérieux. La nécessité d'une Assemblée constituante destinée à recréer un espace démocratique est, jour après jour, de plus en plus évidente. ---------- (*)Ancien président de la commission des affaires étrangères de l'Assemblée nationale, auteur de « Une nouvelle vassalité, Contribution à une histoire politique des années 1980 » (Mille et une nuits, 2007). Contacter André Bellon : andre.bellon@polytechnique.org Le site du groupe République ! : www.le-groupe-republique.fr <br /> <br />
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A
<br /> Traité Européen : The Economist pour un référendum <br /> <br /> <br /> « Give Europe a say ». Le prestigieux hebdomadaire anglais s'engage pour l'organisation d'un référendum sur le nouveau traité européen. <br /> <br /> <br /> <br />  <br /> <br /> <br /> <br /> Pour The Economist, le « nouveau » traité n'a rien de nouveau puisqu'il reprend le texte de l'ancienne constitution. La seule différence serait son appellation de « traité ». « This is a farce » ajoute l'éditorialiste ; en français, un raté. Le nouveau traité était censé simplifier l'architecture de l'Union et rendre intelligible le texte, or ce serait tout l'inverse. La complexité du texte (240 pages quand même) ne serait d'ailleurs pas un accident, « it is its raison d'être » : elle justifierait une ratification rapide par les Parlements nationaux, sans risquer le référendum. Car il s'agit bien d'un risque pour les gouvernants européens qui veulent voir le traité appliqué dans les plus brefs délais. Le risque que le peuple rejette, par référendum, le texte comme en 2005. Mais cette excuse n'en est pas une pour une institution comme l'Europe qui manque de légitimité et de crédibilité. Pour justifier ce manquement à la démocratie, The Economist souligne deux arguments contradictoires. D'abord, le traité de Lisbonne serait un grand pas en avant pour les membres de l'Union ; et, en même temps, le texte en soi aurait peu d'importance et permettrait uniquement de pouvoir être plus efficace sur les enjeux réels de l'Europe. <br /> <br />
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E
Traité Européen : deux, trois, dix pétitions! Au total, une dizaine de pétitions, à l'initiative de partisans comme d'opposants au traité, circulent sur le net demandant un référendum sur le nouveau traité européen simplifié.  <br /> Voici les principales:.• Le site Debout la République propose une pétition nationale « 16 millions d'électeurs trahis… Et vous ? ! » soutenu par Nicolas Dupont Aignan . • Le site « Respectez notre non ! » soutenu par Jean-Luc Mélenchon. • A l'initiative de figures du « non de gauche », dont Clémentine Autain, Jean-Luc Mélenchon, Marie-Noëlle Lienemann, mais également des personnalités qui avaient fait campagne pour la Constitution européenne, tel Noël Mamère, sur le site referendumeurope2007. • Un site d'européens, « Europeanreferendum.eu », « Let the European people decide ». • Les souverainistes sur le site « Votez 2007.com », soutenu par Philippe de Villiers. • La pétition du Danois Jens-Peter Bond qui demande un référendum dans tous les pays d'Europe . <br />  <br />
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